«L'Arménie a été le premier pays chrétien, elle a adopté la foi chrétienne comme religion d'État en 301. Nous avons ensuite fait partie de l'Union soviétique et du communisme pendant 73 ans. Après cela, nous avons obtenu notre indépendance. Grâce à une révolution pacifique, nous avons obtenu notre démocratie il y a trois ans», déclare Agnes Büttler-Avagyan.
Il y a un an, la guerre avec l'Azerbaïdjan voisin a eu lieu. «Cela a duré 44 jours. De nombreux jeunes gens sont morts. Nous nous sommes retrouvés seuls. Les organisations de défense des droits de l'homme et toutes les organisations avec lesquelles nous sommes impliqués depuis 30 ans n'ont bénéficié d'aucune protection. L'attention des médias internationaux était également faible, le peuple se sentait seul.»
La vie quotidienne, pourtant, fonctionne bien dans le pays, relève-elle : «Vous voyez des fêtes d'anniversaire, la vie continue. Mais si vous parlez à la population, vous vous rendez compte rapidement que personne n’a été épargné. Tout le monde a perdu quelqu'un de sa famille pendant la guerre.»
Les Arméniens ont une forte identité chrétienne. « Être arménien, c'est être chrétien. Pour nous, il était traumatisant de voir que de très vieilles églises, certaines des plus anciennes du monde, construites par des Arméniens, dans la région du Karabakh, où nous avons perdu des terres, appartiennent maintenant à l'Azerbaïdjan, une nation musulmane. Ils détruisent délibérément ces traces anciennes, chrétiennes. Même si l'église en tant que telle n'est pas détruite, ses racines arméniennes sont effacées. Des vidéos circulent parfois, montrant des personnes qui rient et détruisent des croix. C'est très, très triste.»
«Pour le monde islamique, l'Azerbaïdjan est relativement laïque», explique Dave Büttler. «La nation-sœur islamique, c’est la Turquie. Sous Erdogan une grande islamisation y a eu lieu. Il a été prouvé que des milliers d'islamistes issus de la guerre civile syrienne ont combattu au Karabakh, en partie financés par les Turcs. Il y avait des vidéos de personnes criant "Allah akbar", montant sur des églises et brisant des objets. La destruction de biens culturels avait des conotations islamistes. C'est aussi un ethnocide. Et comme le chrétien est aussi arménien, c’est une grande partie des biens culturels arméniens qui est menacée.»
«L'Azerbaïdjan réécrit l'histoire, en s’attribuant le titre de peuple le plus ancien de la région», observe Agnes Büttler-Avagyan. «La femme du dictateur Aliyev est une ambassadrice spéciale pour la conservation du patrimoine à l'UNESCO.»
A cause du pétrole, il y a beaucoup d'argent en jeu. Dave Büttler: «L'université Humboldt en Allemagne finance une chaire de turkménologie.» Des articles y sont publiés qui présentent l'Azerbaïdjan sous un jour favorable.
«Mais il y a aussi de l'espoir. L'Arménie dispose d'une jeunesse dynamique, qui maîtrise également les technologies de l'information et pense en réseau grâce à la diaspora.»
Politiquement, relève Dave Büttler, la société de valeurs de l'Europe est morte. «C’est pendant la guerre du Karabakh, que le pipeline vers l'Azerbaïdjan a été ouvert.» Il est important que l'Azerbaïdjan obtienne des appuis internationaux, en raison de ses atouts culturels. «Ce sont des trésors précieux qui peuvent être perdus. L'Arménie a souvent été déçue par l'Occident, y compris pendant le génocide.»
L'Europe doit être prudente, car le christianisme n'est pas une religion occidentale. «Là où elle trouve ses origines, le nombre de chrétiens diminue massivement». Nous devons maintenant veiller à ce que les derniers bastions de l'Arménie et de la Géorgie ne tombent pas eux aussi.
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